jeudi 27 mars 2014

Abolir le non consentement en psychiatrie

(mise à jour septembre 2022)
Le non-consentement c'est quoi?


C'est un ensemble de pratiques violentes en psychiatrie: hospitalisation d'une personne qui la refuse explicitement, administration de médicaments et autres procédures contre l'avis de la personne. Camisole chimique, torture aux neuroleptiques, inhibition mentale aux neuroleptiques, chantage au traitement, contrôle par le dommage cérébral, les restrictions physiques, les chambres d'isolement, reconditionnement mental, endoctrinement, harcèlement moral, menace de réhospitalisation, refus de sevrage et de baisse des médicaments, refus d'aide au sevrage.

Abolir tout ceci est à la fois une priorité morale et une obligation légale.
C'est la règle définie par l'ONU et acceptée par l'OMS.
La convention ONU CDPH le spécifie explicitement dans les directives sur l'article 14 [1].


Que faire alors?

La mise en œuvre pratique de cette abolition est enseignée par les experts de l'OMS [2].

L'OMS publiera prochainement un répertoire des bonnes pratiques conformes aux droits de l'homme en matière de santé mentale.

Le Centre pour les droits de l'homme des usagers et survivants de la psychiatrie répertorie sur cette page les bonnes pratiques qui existent dans plusieurs pays [3].

L'ONG Santé Mentale Europe est engagée dans la promotion des bonnes pratiques [4].

En Europe ENUSP [5].


Le versant légal

L'article 14 de de la convention UN des droits des personnes handicapées porte sur la liberté et la sécurité de la personne. Il est explicité dans les directives sur l'article 14 [1].

La détention pour motif de handicap mental ou psychosocial (motif psychiatrique) est absolument prohibée.

La détention pour danger supposé envers soi-même ou les autres est contraire à l'article 14.

La détention de personnes considérées comme inaptes à comparaitre en justice est contraire à l'article 14.


La notion centrale est la non-discrimination sur la base du handicap.

Les prises de décision substituées doivent être remplacées par des prises de décisions assistées.

C'est l'article 12 de la convention ONU CDPH, portant sur la reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d'égalité.
Cet article est explicité dans l'observation générale n°1 sur l'article 12 [6].

Tous les droits de l'homme sont inter-dépendants.
Chacun d'entre nous a le devoir de dénoncer les violations et de faire changer les pratiques.


Quand c'est contraint ce n'est pas du soin.

La violence est le monopole de la police, ce n'est pas le travail des soignants [7].

La contrainte réalise un cercle vicieux de violence psychiatrique, qui est vécu comme une forme de kidnapping, d'enfermement, de non-communication, d'humiliations, de punitions, de contentions, de camisole chimique imposée, de mises à l'isolement, de menaces de réhospitalisation violente, de fichage et de perte d'autonomie avec la mise sous dispositifs de tutelle/curatelle. Avec d'autres mesures discriminatoires, cela aboutit à une sorte de sous-citoyenneté, une forme d'esclavage pharmacologique à durée indéfinie, un empêchement à se réaliser et à procréer. On ne peut pas retirer un diagnostic psychiatrique.

D'après les témoignages, ce traumatisme est si intense et cumulatif que certaines personnes ne comprennent jamais ce qui leur est arrivé et en viennent à construire des interprétations à partir de cela. D'autres ne consultent plus jamais, ni même des médecins, et certaines préfèrent la rue à la psychiatrie à cause des menaces de contrainte, enfin d'autres personnes survivent en exil à l'étranger afin de fuir la menace de la psychiatrie forcée.

De tels traumatismes font perdre à la personne ses moyens: elle vit dans la peur, sous la menace de la réhospitalisation. Le traumatisme empêche la personne de témoigner et d'assumer un rôle politique dans la défense des droits des personnes avec handicap psychosocial.


Les études montrent la gravité des traumatismes subis: syndrome post-traumatiques, suicides.

Les hospitalisations et soins sans consentements provoquent des syndromes de stress post-traumatiques et des conduites d'évitement. Dans cette étude la moitié des patients sont traumatisés [8].

L'hospitalisation psy forcée tue. Par suicide. Risque de suicide ultérieur multiplié par 44.3 dans cette étude [9].


Il est absurde de consulter un médecin qui risque de vous faire perdre tous vos droits.



En France, les lois de santé mentale réalisent une masquerade de procès.

Il n'y a pas de contradictoire: non présentation de témoin. Les moyens ne sont pas donnés de réaliser une contre-expertise.

Les droits de la défense ne sont pas respectés: non communication avec l'avocat, non communication des pièces du dossier, pas les moyens de préparer une défense, altération des facultés et pertes des moyens à cause des médications forcées, du traumatisme et des pressions. [10].

Les juges ne considèrent que la forme et ne sont pas habilités à juger sur le fond: ainsi les mainlevées de soins sans consentement sont basées sur le non-respect de la procédure dans tous ses détails. [11].

De fait, ce juge des libertés et détentions se comporte comme un bureau d'enregistrement de l'arbitraire psychiatrique. Pourquoi l'appelle-t-on un juge alors?

Le droit constitutionnel est violé:

- Droit à disposer de son corps et droit à l'intégrité physique.
- Droit à un procès équitable et non pas arbitraire.
- Loi 2011-2013 "impossibilité à consentir": Ceci n'est pas défini. Par exemple, les psychiatres assimilent le refus de consentir à un "déni du trouble" et en font un argument du "trouble" supposé. Par cet artifice, le non-consentement se transforme en impossibilité à consentir, ce qui est un raisonnement circulaire et une absurdité.
- Loi 2011-2013 "Présence de troubles mentaux": cette expression est vague et peut s'appliquer à chacun. Par exemple, le sevrage de caféine est un trouble mental dans le DSM 5.
- Droit de liberté de croyance, qui est aussi le droit de ne pas croire:
1) Se prétendant biologique, mais n'étant pas validée par des preuves ou des examens biologiques, la psychiatrie peut être considérée comme une croyance: imposer un jugement psychiatrique à une personne qui n'y croit pas est une violation de ce droit.
2) Faire valider cet arbitraire par un juge en est une autre violation, car elle définit une croyance d'état.
3) Traiter la personne selon cette croyance, alors qu'elle n'y adhère pas, en est une troisième.

Le droit international est violé: CDPH ONU: articles 12, 13, 14, 15, 17, 25.
Statut de Rome, Cour Pénale Internationale.
- Persécution et génocide des personnes appartenant au groupe social des personnes avec handicap psychosocial et de leurs enfants. Loi 2011-2013 "Présence de troubles mentaux": cette expression discrimine le groupe social des personnes avec handicap psychosocial.
- Tortures et altérations sévères de l'intégrité physique et mentale des personnes: par exemple torture aux neuroleptiques intentionellement pratiquée, dans un but spécifique, de façon officielle par l'autorité médicale, avec souffrance sévère comme l'akathisie. Les interventions psychiatriques non-consenties "pourraient fort bien représenter des tortures". explique le Rapporteur de l'ONU sur la torture, dans son rapport du 14/2/2020 au Conseil des Droits de l'Homme [23].


Comment cela est-il vécu en pratique ?

Les personnes sont enfermées et droguées, choquées par la brutalité de l'injustice, interdites de communiquer, dans le gaz, qu'est-ce que vous imaginez ? Les recours et les contrôles prévus sont inféodés à l'idéologie, les professionnels hostiles. En pratique, c'est le plus souvent le trou noir, pour le patient qui est médiqué.

Témoignage sur ENUPS (réseau européen des usagers et survivants de la psychiatrie): "tout de suite c’est la camisole chimique directe qui empêche même physiquement de parler pendant deux jours; ensuite vous pouvez parler, une fois que vous êtes bien drogué."

"Dès que vous êtes admis, on vous administre un traitement de choc de sorte que, au bout de quelques jours, vous n’êtes plus vous-même." Témoignage d'un usager sur le site CRPA. [19]

Cette caricature de justice est démontrée par la vidéo passée sur TF1 dans l'émission 7 à 8 le 13 octobre 2019: L'avocat à qui l'on amène un patient assommé de médicaments, et qui tombe de sa chaise, dit ensuite au juge qu'il ne demande pas la levée de la contrainte [10].


Des certificats établis au moyen d'une sémiologie aberrante.


En fait, la loi donne carte blanche en pratique à des psychiatres qui inventent des maladies qui n'existent pas dans les examens biologiques, qui les fabriquent par leurs prescriptions, par les dépendances médicamenteuses réalisées, par les maladies iatrogènes qui en résultent, et qui n'arrêtent jamais certains traitements, qui ne proposent pas d'alternative, qui ont des conflits d'intérêt, et qui appliquent les lois corporatistes de confraternalité.

Abolir le non-consentement en psychiatrie


L'hopital détourné en une agence de violence privée: l'éthique médicale bafouée.

Enfin je propose de considérer comment la coercion psychiatrique d'office ou à la demande d'un tiers peut fonctionner à la façon d'une agence de violence privée au service d'un client, par exemple quand une négociation n'aboutit pas. Ce peut être un conflit entre une société et ses dissidents, un conflit conjugal entre époux, ou un conflit familial entre parents et enfants, par exemple pour nier une affaire de famille, une maltraitance, ou conflit de croyance ou de dogme. Le motif de la dégradation psychiatrique peut être une question d'argent, d'héritage, ou de divorce, et de garde des enfants. Il peut s'agir de discréditer ou de faire taire un lanceur d'alerte ou un employé. En détruisant une des parties dans le conflit, désignée comme une maladie à combattre, les psychiatres instrumentalisent la médecine comme une arme dirigée contre une personne. Ils se mettent au service de l'injustice, qu'elle soit sociétale, conjugale ou familiale. Le conflit n'est pas résolu, mais la condition devient chronique. Un exemple ici [22].


Références:
{1] Article 14 de de la convention UN des droits des personnes handicapées:
http://www.ohchr.org/EN/NewsEvents/Pages/DisplayNews.aspx?NewsID=15183&LangID=E

En français là:
http://depsychiatriser.blogspot.com/2020/03/convention-onu-cdph-liberte-et-securite.html

[2] La mise en œuvre pratique de cette abolition est enseignée par les experts de l'OMS:
https://www.who.int/publications/i/item/who-qualityrights-guidance-and-training-tools

[3] Le Centre pour les droits de l'homme des usagers et survivants de la psychiatrie répertorie sur cette page les bonnes pratiques qui existent dans plusieurs pays.
http://www.chrusp.org/home/good_practices

[4] L'ONG Santé Mentale Europe est engagée dans la promotion des bonnes pratiques.
https://www.mhe-sme.org/who-we-are-2/

[5] European Network of Users and Survivors of Psychiatry (ENUPS)
http://enusp.org/

[6] L'observation générale n°1 sur l'article 12 de la Convention ONU CDPH.
http://www.ohchr.org/EN/HRBodies/CRPD/Pages/GC.aspx

[7] Zinkler M. von Peter S. "End Coercion in Mental Health Services—Toward a System Based on Support Only", 2019.
https://www.mdpi.com/2075-471X/8/3/19/htm

[8] Priebe, Stefan & Bröker, Matthias & Gunkel, Stefan. "Involuntary admission and posttraumatic stress disorder in schizophrenia patients", 1998.
http://www.researchgate.net/publication/13608566_Involuntary_admission_and_posttraumatic_stress_disorder_symptoms_in_schizophrenia_patients

[9] Carsten Rygaard Hjorthøj , Trine Madsen, Esben Agerbo, Merete Nordentoft, "Risk of suicide according to level of psychiatric treatment: a nationwide nested case–control study.", 2014.
http://link.springer.com/article/10.1007/s00127-014-0860-x

[10] Documentaire TF1 sur les lois de santé mentale, émission 7 à 8 le 13 octobre 2019.
https://www.tf1.fr/tf1/sept-a-huit/videos/sept-a-huit-psychiatrie-un-juge-face-aux-malades-19143383.html

[11] Etude sur les soins sans consentement.
http://psychiatrie.crpa.asso.fr/IMG/pdf/2014-12-31-etude-sur-les-soins-sans-consentement-cour-de-cassation.pdf

[12] Statistiques 2015 des contrôles judiciaires:
https://psychiatrie.crpa.asso.fr/IMG/pdf/2016-02-01-statistiques-2015-controles-judiciaires-hsc.pdf

[13] Dossier de presse 2016 de la Controleure Generale des lieux de privation de liberté en France:
http://www.cglpl.fr/2016/isolement-et-contention-dans-les-etablissements-de-sante-mentale/

[14] Article Quotidien du médecin 28/11/2012: http://www.lequotidiendumedecin.fr/actualite/sante-publique/3-000-hospitalisations-sous-contrainte-seraient-injustifiees

La loi française repose sur les critères extraordinairement vagues de "troubles mentaux", définis et appréciés par les promoteurs de l'idéologie psychiatrique elle-même:

[15] Loi 2011:
http://www.sante.gouv.fr/la-reforme-de-la-loi-psychiatrie-de-1990-8-points-cles-pour-vous-guider.html
http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/Tableau_exHDT_.pdf

[16] Loi 2013:
http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000027996629&dateTexte=&categorieLien=id

[17] Convention des Nations-Unies relative aux droits des personnes handicapées, 2011.
http://www.un.org/french/disabilities/default.asp?id=1413

[18] L'enfermement et le "traitement" de force sont assimilables à la torture:
Le 4/3/2013 au conseil des droits de l'homme des Nations Unies, à Geneve, le rapporteur special sur la torture demanda d'arrêter les interventions psychiatriques forcées comme la médication de restriction mentale forcée, les electrochocs, la psychochirurgie, les contentions et l'isolement, et pour l'abolition des lois qui autorisent le traitement et l'enfermement psychiatrique obligatoire.
Raport UN sur la torture psychiatrique

[19] Témoignage sur le site CRPA.
http://psychiatrie.crpa.asso.fr/482

[20] L'Italie a entrepris de fermer les établissements-prison en 1978 sous l'impulsion  du Dr Franco Basaglia. Mais la réforme n'a pas abouti complètement. L'Italie a rouvert des lits, enferme et drogue de force sur certificat médical, torture à nouveau, les victimes en meurent...
https://absoluteprohibition.wordpress.com/2016/03/26/in-italy-we-dont-have-a-law-against-torture-by-erveda-sansi/
https://absoluteprohibition.wordpress.com/2016/03/25/the-mad-hatter-presents-a-conversation-with-dr-giorgio-antonucci/

[21] L'International Association Against Psychiatric Assault s'est fixé comme objectif d'abolir la coercion en psychiatrie.

[22] Le dossier de l'internement abusif de Valérie Dubois avec de faux certificats médicaux.
http://www.maveritesur.com/valerie-dubois/victime-d-un-internement-abusif-je-me-bats-pour-mes-enfants/555:   Le médecin et le mari ont été condamnés en appel, dossier CRPA.

[23] Les interventions psychiatriques non-consenties "pourraient fort bien représenter des tortures". explique le Rapporteur de l'ONU sur la torture, dans son rapport du 14/2/2020 au Conseil des Droits de l'Homme.
https://www.ohchr.org/EN/HRBodies/HRC/RegularSessions/Session43/Documents/A_HRC_43_49_AUV.docx

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